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19 juin 2014 4 19 /06 /juin /2014 17:50

Plasticiens rejoignez-nous .


La Maison des Artistes a été créée pour défendre les droits des artistes auteurs des arts graphiques et plastiques.

Elle incarne au niveau national le statut des artistes auteurs auprès des institutions et des organismes sociaux.

Elle est la plus grande association représentative des artistes auteurs des arts visuels.

Pourtant, plus de soixante ans après sa création, elle est menacée de disparition, par un projet de réforme mal adapté aux réalités du statut d’artiste auteur.

C’est une épée de Damoclès,
visant à faire disparaitre l’agrément donné par l’Etat en 1964.

Si La Maison des Artistes perdait cet agrément…
l’environnement des artistes serait gravement fragilisé,
ainsi que leurs conditions de vie et de création.

LA MAISON DES ARTISTES :
Une offre particulière pour un statut particuli
er





André Malraux a institué La Maison des Artistes, la désignant comme organisme agréé traitant principalement de l’affiliation des artistes auteurs au régime général de la Sécurité Sociale...mais pas seulement…

En effet, La Maison des Artistes dispense deux missions complémentaires : une mission de service public et une mission d’intérêt général.
D’une part, en tant qu’association agréée par l’Etat depuis 1964, elle assure la gestion des assurances sociales des artistes auteurs et de leurs clients pour la branche des arts graphiques et plastiques.
D’autre part, en son siège, elle assure des missions d’accompagnement des artistes dans leur carrière professionnelle, de conseil, d’information, d’assistance, d’aide sociale, de valorisation de leur « statut », de veille et de défense des intérêts professionnels auprès des Pouvoirs Publics.

La Maison des Artistes édite également une carte d’adhérent. Véritable carte d’identité de l’artiste, elle valorise sa professionnalité auprès des lieux d’exposition nationaux et régionaux, des fournisseurs de matériel beaux-arts, de prestataires spécialisés, des organismes sociaux et fiscaux, …
Les artistes détenteurs de cette carte bénéficient d’un conseil juridique permanent ainsi que d’un conseil comptable et fiscal.
Ainsi, par son expertise, La Maison des Artistes est aujourd’hui la structure de référence capable de leur apporter LA réponse adaptée à leur statut spécifique, qui ne correspond jamais aux références habituelles des organismes sociaux et fiscaux. Il n’y a pas de case pour désigner l’artiste auteur. En effet, de par ses particularités, son statut appartient tour à tour à la catégorie des « professions libérales », des « professions assimilées salariées » voire des « activités non agricoles non salariées »… vaste définition !

L’activité de l’artiste auteur est unique en son genre. Son statut repose à la fois sur les spécificités du travailleur indépendant, pour son autonomie professionnelle, et sur celles du salarié, pour sa couverture sociale. Ainsi, L’artiste est rattaché socialement au régime général des salariés et fiscalement aux professions libérales.


UN PROJET DE RÉFORME INADAPTÉ

La réforme sur le régime particulier des artistes vise à instaurer une caisse unique de sécurité sociale et de déboucher à terme sur une fusion totale dans le régime général. Elle a pour conséquence immédiate d’écarter la Maison des Artistes de la gestion de la branche professionnelle des arts graphiques et plastiques du régime des artistes auteurs par le retrait de son agrément d’Etat.

La réforme aurait pour effet:

  • Une rupture de la relation de proximité entre les artistes et leur seule reconnaissance professionnelle : leur régime de sécurité sociale.
  • Une perte de l’expertise exceptionnelle transversale diffusée sur tout le territoire national.
  • Une disparition de la veille professionnelle, efficace, concrète et légitime


Les missions dispensées par l’association sont dépendantes de son agrément d’Etat, qui l’autorise à agir efficacement auprès des interlocuteurs publics ou privés afin de défendre les intérêts professionnels des artistes auteurs.

La création d’une caisse unique conduirait inéluctablement à un traitement des dossiers et à une gestion globale sans « humanité » dans laquelle l’accueil, l’écoute, l’information seront mis au second plan. Les artistes ne peuvent ni ne veulent traiter avec une caisse de sécurité sociale déshumanisée, en rupture avec leur réalité professionnelle, sans moyen de recours.

Si La Maison des Artistes ne s’oppose pas à une réorganisation des services de sécurité sociale, dansl’objectif d’une amélioration nécessaire du régime des artistes auteurs, ses représentants souhaitent, au nom de leurs 18 000 adhérents, que cette évolution s’effectue en concertation et non pas aux dépens des artistes qu’elle représente.

La Maison des Artistes a un engagement de solidarité, elle entend le faire vivre et le respecter, dans un contexte socio-économique où plus que jamais l’artiste a une fonction sociale prépondérante de témoin d’une histoire en marche.

« Tout art est un moyen de possession du destin. Et l’héritage culturel n’est pas l’ensemble des œuvres que les hommes doivent respecter, mais de celles qui peuvent les aider à vivre » André Malraux, 1936, Discours sur l’héritage culturel.




Contact Maison des Artistes <http://www.lamaisondesartistes.fr/site/> :

Nathalie Meindre • nathalie.meindre@lamaisondesartistes.fr

Contact presse :

Sylvia Beder <http://www.sylviabeder.com>sylvia@sylviabeder.com • Tel 01 42 18 09 42
Béatrice Martini • sbc@sylviabeder.com • Tel 01 43 20 51 07

 

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13 juin 2014 5 13 /06 /juin /2014 18:41

Sous ce titre Jacques Livchine fait par de ses etats d'âme à la liste "rue clique la rue info" face à la grève des intermittents. Cela me rappelle un peu le jour où un certain Jean-Claude Brialy m’avait dit « si je savais que tout le monde fera la grève je me mettrai en grève » j’avais été heureux de lui répondre « mais Jean-Claude si vous êtes en grève tout le monde y sera » cette année là je crois me souvenir qu’il fit grève (pas tout seul) et les artistes interprètent obtinrent des droits nouveaux, pour l’utilisation de leur travail enregistré. Rien à voir avec la grande révolution mondiale mais beaucoup continuent à apprécier ce droit.

Jacques Livchine à un grand talent de narrateur ou plutôt de polémiste, il va même jusqu’à faire appel à son père, tel Don Juan, pour justifier ce qui à mon avis n’est pas justifiable. Mais après tout je n’ai peut-être pas raison laissons-lui la parole :

« Amis, citoyens, camarades, artistes dramatiques et comiques

Tant pis je me jette dans le brasier,

je me suicide

je serai fusillé sur la place de grève

mais là tout devient trop de chez trop

et je ne supporte pas d’avoir toute l’opinion publique contre nous

je ne supporte pas nos discours de bien- pensance

bref j’étouffe

et je disside

je ne supporte pas le regard de mon père, je ne supporte pas la pitié.

Mon père est mort bien- sûr

mais toute ma vie il m’a traité de “raté”, de type vivant à ses crochets,

bref toute ma vie,

je n’ai été pour lui qu’un intermiteux

un handicapé incapable de gagner sa vie tout seul

Alors que mes cousins ingénieurs, docteurs, avocats, entrepreneurs achetaient leurs baraques

moi je squattais des petits bouts dans son usine,

je vendais les copeaux de cuivre que je volais la nuit

Je volais aussi l’argent des bouchers charcutiers, des travailleurs de l’automobile, des caissières de supermarché (mes indemnités d’intermittents)

et je ne le rendais qu’à une petite élite de spectateurs de théâtre, professeurs et autres diplômés

Et puis surtout, je n’étais pas connu. Ma légitimité eut été d’être connu.

ou bien d’avoir une utilité sociale.

Bref jusqu’à 40 ans, je n’ai entendu que ça , “espèce d’assisté, espèce de raté"

Sur la tombe de mon père, en 1982, je me suis dit “ça y est jacques, te voilà libre, à toi le théâtre”. J’étais trop content de le voir mort et de ne plus avoir son regard réprobateur et méprisant.

Mais voilà mon père est revenu, mon père c’est le medef, c’est FO, c’est la CFDT, c’est Sarkozy, c’est le libéralisme.

“Pas de pitié pour ceux qui sont incapables de rapporter du vrai blé qu’ils ont gagné eux -mêmes"

Je les calcule ces gens là, je les connais bien,

et qu’ils souhaitent ma mort, c’est normal.

Alors je réfléchis, et je me dis, nous avons crié en 2003, que le nouveau protocole était meurtrier, que nous allions tous mourir, que la France allait devenir un désert culturel, et qu’une France sans culture, c’était un jardin sans herbe ni fleurs.

Dix ans plus tard : le nouveau protocole n’a résorbé aucun déficit, et le nombre des intermittents n’a pas diminué, et il y a encore 1000 compagnies en Avignon, qui vont jouer 20 fois, et déclarer 5 cachets, et il y a encore à Chalon et Aurillac des centaines de compagnies dont les répétitions ont été payées par l’Unedic.

Et nous on recommence le même laïus “ vous tuez l’Art, vous nous tuez”.

J’en ai marre de ces fausses prophéties.

Et on recommence, on va faire la grève, on va les faire plier, ils ne vont pas signer !

Bravo Montpellier et tous les autres, je voudrais juste que votre mort serve à quelque chose.

Je suis troublé, j’ai l’impression que la guerre de 14 recommence, on part tous la fleur au fusil faire la grève dans tous les festivals, mais moi je n’ai pas envie de redevenir comme en 1914 et 2003 de la chair à canon.

Que le IN d’Avignon fasse grève, oui, les contrats sont signés et les comédiens seront payés. Oui, et tant mieux, qu’Aix en Provence saute, oui, tant mieux,

le OFF d’Avignon fera comme en 2003, 90% des compagnies joueront. Ils feront une journée de grève symbolique, c’est tout, le 14 juillet. C’est obligé. Parce que les loueurs de salle, s’empressent de toucher l’argent avant le festival, pour eux c’est tout bénef.

Moi c’est viscéral, je ne referai pas la copie conforme de 2003.

je ne ferai la grève qu’uniquement si elle se politise,

oui, avec une demande de dissolution de l’assemblée,

une démission de Hollande qui a trahi comme tous ses ministres oui.

Alors oui, si un vrai courant se dessine en France, et que des entreprises nous rejoignent, et qu’une solidarité fasse tâche d’huile , oui.

Mais tous seuls, comme ça entre nous, pour la correction de 4 lignes sur délai de carence, je dis non.

Ce que je ne comprends pas c’est cet article de merde de délai de carence qui mettrait 20 000 intermittents en danger de mort, si Filipetti veut payer, pourquoi refuse t-on ? Là je ne comprends plus rien à ce mot d’ordre que j’ai lu “non à la caisse de bienfaisance”.

En conclusion, chers camarades,

je ne veux pas crever pour un avenant à un protocole,

mais si c’est pour renverser le pouvoir, et faire la révolution ,

oui, comptez sur moi, c’est un combat classe contre classe,

que nous devons livrer, ils ont décidé de nous tuer, alors

Prenons le pouvoir, nous en sommes capables,

il est insupportable d’être dirigé

par des incapables,

Le PS s’est jeté dans les bras du Medef, il n’a plus de légitimité

les gens ne veulent même plus voter

donc

Artistes, nous possédons les armes de l’esprit

Tous en grève pour la révolution culturelle d’abord, économique ensuite

avec un nouveau partage des richesses.

On n’en peut plus

Jacques LIVCHINE

Metteur en songe

Le théâtre de l’Unité, c’est toujours autre chose… »

La lutte peut rendre heureux

A Jacques et à tous les autres. Ça va être la première bataille des intermittents à laquelle je ne prends pas part peu ou prou, bien que la vie ait fait que je me suis rarement trouvé en situation d’intermittence. Aujourd’hui je suis cloué dans un fauteuil roulant d’une manière permanente, tel le Old timer de Lucky Luc (même après une bataille de plus de 12 ans, c’est parfois le crabe qui gagne) tu vois Jacques, encore plus fort, je ne fais pas appel au spectre de mon père mais au mien qui arrive à grands pas.

Il y a à peu près trois jours j’ai failli sauter de joie (si j’avais pu) en écoutant sur France Culture le billet d’Edwy Plenel http://www.franceculture.fr/player/reecouter?play=4865200

Intermittents vous n’avez peut-être pas encore gagné la guerre mais vous êtes sans train de gagner la bataille idéologique. Or nous savons tous qu’aujourd’hui les guerres se gagnent au moins autant sur le terrain idéologique que sur le terrain militaire.

Je ne peux oublier également les prises de position récentes des élèves de ma chère ENSATT: la Première de « War and Breakfast » de Mark Ravenhill, mise en scène par Jean Pierre Vincent avec la 73e promotion de l’ENSATT est annulée. http://url.snd9.ch/visu-D170141F-DDFE-462F-BA3B-39F067B1CB03-179899776-389784-13062014.html

En lieu et place du spectacle, une assemblée générale ouverte au public se tiendra à l’ENSATT, lundi 16 juin à partir de 19h. Au-delà l’Association Francophone des Futurs Usagers du Théâtre (AFFUT) qui regroupe 11 écoles de théâtre (l’académie de Limoges, le CNSAD de Paris, école de la comédie de Saint-Étienne, ENSAD de Montpellier, ENSATT de Lyon, EPSAD de Lille, ERAC de Cannes, ESAD de Paris, ESTBA de Bordeaux, TNB de Rennes, TNS de Strasbourg.) qui se sont adressées en commun au ministre du travail pour l’enjoindre de ne pas signer la convention.

Je sais que certains parmi vous pour penser qu’il s’agit des nantis mais ne serait-ce pas là la position symétrique à celle du père de Jacques ?

Comme ces jeunes qui se battent aujourd’hui pour leur avenir j’ai moi-même passé une partie de ma vie à l’ENSAT qui s’appelait à l’époque plus modestement le centre d’apprentissage d’art dramatique. Croyez-moi, annuler un spectacle de fin d’année lorsqu’à tort ou à raison on a le sentiment que notre avenir en dépend, ce n’est pas un petit engagement.

Jacques, quoi que tu en dises ta carrière a été brillante, la mienne fut modeste mes parents n’avait pas de cuivre à vendre mais ils étaient très heureux d’apercevoir parfois mon nom au bas d’un programme. Ta brillante polémique ne concerne pas les intermittents, elle te concerne toi et comme disait un de mes vieux collègues machiniste « ce que tu portes dans ta brouette ne décharges pas ma camionnette » je crois que le mouvement actuel est suffisamment majeur pour comprendre qu’il peut-être source de difficultés pour le gestionnaire de PME que tu es.

Pour le reste, même en petite voiture, la lutte (y compris celles des autres) peut rendre heureux. Je n’en ai jamais douté.

Claude Quémy

P.S. allez jeter un œilà la revigorante vidéo réalisée par les élèves des écoles de théâtre en cliquant ici :http://www.futurs-usagers-du-theatre.com/2014/05/18/non-%C3%A0-l-agr%C3%A9ment-vid%C3%A9o-weie-2014/

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12 juin 2014 4 12 /06 /juin /2014 14:06

Cet article est reposté depuis Le blog de Claude Quemy.

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12 juin 2014 4 12 /06 /juin /2014 13:37

Mon père m’a littéralement traînée au Cours Simon. J’y suis allée exactement trois fois.

J’ai détesté.

Un mois plus tard, je descendis la rue Vavin, seule et frappai à une porte d’immeuble décorée de mosaïques.

A l’intérieur, une grande salle avec une grande estrade devant laquelle trônait l’imposant Raymond Girard.

C’était sa dernière année de professorat pour notre plus grande chance.

J’ai annoné, terrorisée, une poésie. Il a jugé ma voix de : « bel organe », et mon physique d’ « avantageux » et de suite, a cerné mon potentiel.

Il mentionna un cycle de trois ans…

Dans les heures qui suivirent, j’enchaînai textes, exercices de respiration et de diction. Le Concours de fin d’année était pour juin et il me jugea capable d’y participer.

Christian Brendel, Pascaline Naudin, François Guizerix et quelques autres passions l’épreuve face à un Jury prestigieux avec à sa tête Catherine Deneuve.

Le prix spécial du jury nous fut accordé à François et à moi dans deux scènes d’un genre très différent.

Suite à ce succès, Raymond Girard décida de me préparer au concours de l’ENSATT.

Pour la scène imposée, « Ruy Blas » je choisis François pour me donner la réplique : il possédait le profil d’un jeune premier, intense et ténébreux !

Il y avait bel et bien une espèce d’électricité entre nous, une attirance certaine, mais il ne vivait pas seul et j’étais bien trop amoureuse d’un autre…

A la fin de notre scène, Pierre Roudy apostropha François :

« Puis-je savoir pourquoi vous ne vous présentez pas en section comédien ? »

« L’age, Monsieur, j’ai dépassé la limite autorisée. » répondit-il

« Eh ! Bien nous faisons une exception…Préparez-vous pour le second tour ! » ordonna Pierre.

Nous fûmes reçus tous deux.

Lui chez Michel Favory, avec, Marie Marfaing, Françoise Pinaud et Arnaud Bédouet, moi, chez Roger Mollien – pour qui j’eus une admiration totale et immédiate – et chez Jean Paul Zehnacker avec, entre autres, Luc Etienne, et André Obadia.

Une année magique débutait dans l’euphorie. Les clans se formaient, les amitiés se forgeaient et les amours variaient. Le Bonheur à l’état pur.

Nous passions de Tchékhov à Molière pour finir avec Pinter. Palette multiple. Je n’y ai connu aucune jalousie, mesquinerie ou engueulades. Nous étions soudés, complices et conscients de notre invraisemblable chance.

Ce lieu possédait la « grâce ».

Yves Gasc, donnait des cours passionnants de poésie, peu d’élèves assistaient au cours d’anglais, et nous étions morts de rire avec Maître Gardère (le bien nommé, à qui nous donnions le « la ») professeur d’escrime, toujours entre deux verres dont les cours se déroulaient dans une gigantesque pagaille !

Nous préparions pour la fin d’année « Le Cid » avec Mollien qui me gratifia de deux rôles en alternance : celui de Chimène et celui de l’Infante.

Fallait-il qu’il ait confiance en moi ! Il fut sans conteste mon meilleur professeur. Nous apprîmes à décortiquer un texte de tragédie comme un musicien aborde une partition musicale.

Les costumes, d’époque, somptueux furent réalisés à l’atelier de la section des costumiers.

Ils nous ravirent. Nous apprîmes dans ce ravissant petit théâtre à déambuler, et déclamer avec plusieurs tissus épais, de lourdes coiffes, et des fraises suffocantes.

Première grande émotion scénique, apprivoisement d’un texte ardu face avec un public averti.

Apprendre à domestiquer, contenir le trac, ennemi maléfique incontournable.

Il me reste quelques photos de ce spectacle original et magique, de Kathie Kriegel, de Pascaline Naudin, d’André Obadia et de ma pomme.

J’ai traversé ces représentations telle une funambule, voire une somnambule.

Je garde un souvenir impérissable d’un soir de fou rire général, en scène. Nous pleurions littéralement, les épaules secouées, dos au public. Tous, incapables de sortir un vers suite à Don Diègue qui avait répété cinq fois une identique tirade ! Trou général, l’audience, Dieu soit loué, fut complice.

Hilarité et honte….Nous reprîmes, sans pour autant oser nous regarder dans les yeux !

Peu après, Yves Gasc – grâce auquel eurent lieu des soirées poétiques éclectiques – m’encouragea à présenter LE Conservatoire.

« Tu es prête » m’ordonna-t-il. J’y allai à reculons…

Naturellement je demandai à François Guizerix, de me donner la réplique dans « Mademoiselle Julie » d’August Strinberg.

Je lui avais porté chance, à son tour de me prouver sa reconnaissance !

Gagné.

Je fus admise et François fît sa seconde année à L’ENSATT. Le bienheureux…

Le lieu imposant, l’ambiance froide, les règles draconiennes, les « anciens » snobant les nouveaux, l’extrême sérieux des professeurs, tout était différent de ma chère rue Blanche.

Je n’arrivai pas à m’y intégrer. Finalement, pas ma tasse de thé, même si je m’y fis, vaguement, deux ou trois amis comme Didier Bourdon ou Eric Prat.

Un grand plaisir cependant : les cours d’Antoine Vitez les samedis matins, en spectatrice.

Je n’y passai qu’un an à peine, engagée très vite pour un rôle principal dans un théâtre « privé ».

Les autres me jugèrent. Une pestiférée.

Jacques Rosner, le directeur, me dit alors : « Vous apprendrez mieux votre métier « sur le tas » que de passer encore deux ans ici. »

OUF ! Sauvée ! Je n’allais vraiment regretter que les cours de danse très matinaux avec Robin Renucci et Anne Canovas…

Après avoir passé cinq ans à jouer en France avec parfois des anciens de la Rue Blanche comme Pierre Tarbouriech ou Gilbert Ponte, puis cinq autres à New York avec la compagnie de John Strasberg, je décidai – entourée de quelques français expatriés – de créer une compagnie franco-américaine, bilingue, avec des textes français traduits en anglais.

Avec le montage de « L’Orchestre » de Jean Anouilh, je fis venir deux « anciens » : Véronique Lindenberg et Christian Aubert.

Nous donnions deux versions, l’une en anglais, l’autre en français et jouions les deux tous les soirs…Sacrée gageure. Expérience passionnante mais peu lucrative…

Pour des raisons qui me sont encore obscures, j’arrêtai cette carrière à trente ans, toujours incapable d’affronter, muette et tétanisée, l’appareil noir, monstrueux, à mes yeux : la caméra de cinéma.

Longtemps après, un jour d’avril, je reçus une missive de Nathalie Rheims : elle organisait une grande soirée avec les comédiens de l’ENSATT des années 79 et 80 (je crois ?) et m’engageait vivement à m’y rendre. J’étais à Los Angeles. Un peu loin. Un peu cher, aussi, l’aventure.

Mais avec la liste de tous ces noms, des cascades de souvenirs resurgirent…Tant pis ! Je pris quand même un billet et m’envolai vers ces retrouvailles.

Ils y étaient presque tous, rassemblés, à la Cité Universitaire. Les connus, les moins connus et les inconnus tout court.

Embrassades joyeuses, déclarations, aveux, effervescence, ça parlait fort et ça riait comme des mômes. Non, pas changés, en apparence pour certains, en vérité pour d’autres.

Dans un coin, je vis accoudé à la fenêtre, François Guizerix, l’air triste et désabusé.

Nous parlâmes jusqu’à l’aube et aussi ivres l’un que l’autre, il mit une heure à me raccompagner chez moi rue de Seine, en collant les trottoirs !

En cette année 1991, il revint souvent au bout du bout de la rue de Seine. Nous avions connu d’atroces souffrances post divorces. Moins par moins faisant plus, nous réapprîmes à rire haut et fort de concert.

Le dix octobre 1992 naquît notre première fille, Margaux.

Le huit octobre 1993 notre seconde fille, Louise vit le jour.

Un an avant de retrouver les « anciens », à la mort de ma grand-mère, j’ai déniché dans son portefeuille, parmi deux ou trois photos jaunies, un extrait de presse mentionnant, côte à côte, les deux noms de Guizerix et Manusardi datant de notre jeunesse et de ce prix du jury partagé.

Ce fut le jeu de l’amour et certainement pas celui du hasard…

L’aventure dura dix ans.

Il vit dans ses « guignols »

Je vis le crayon au bout des doigts.

Kristina Manusardi

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12 juin 2014 4 12 /06 /juin /2014 13:36

Cher Claude, je suis touchée par ton appel, et te remercie pour cette invitation à revisiter les lieux de la mémoire de ces années « d'études » au centre de la rue Blanche. J'en ignorais encore l'histoire ! Coïncidence du temps...ma date anniversaire est la même. Il se trouve que j'ai visité L'ENSATT l'hiver dernier, y ai rencontré Simone Amouyal. Dire que j'ai été très impressionnée par les moyens techniques mis à la disposition des élèves est un euphémisme. En réalité, en déambulant dans les longs couloirs, j'étais en train de prendre la mesure du temps. Un demi-siècle s'est écoulé... 50 années depuis 1959-60...1e jour où la porte du numéro 21 rue blanche s'est ouverte sur une maison particulière enclavée dans la rue étroite. Un entresol et deux étages ; un escalier conduisait à une rotonde vitrée qui ouvrait sur un jardin enclos, le cœur et le centre de la maison, un espace dont les dimensions intimes, presque familiales protégeait encore des sédiments d'enfance. Un Sas pour passer d'un pays à un autre, s'emplir les poumons d'un nouvel état.

Je revois les visages des professeurs : Teddy Bilis aux yeux rieurs et tendres, Henri Rollan et sa « boyard maïs » éteinte, qui serrait les mots comme un aigle sa proie, et nous guidait dans la conscience. Ce qu'il nous a enseigné n'avait rien d'académique, c'est grâce à son exigence que j'aie franchi l'étape du conservatoire. À l'étage au-dessus, il y avait le petit théâtre. Hors des heures de cours matinales, tous les lieux étaient occupés et vibraient de discussions, de questionnements sur le travail commun et notre ressenti. Le brouhaha parfois atteignait le plafond et remontait jusqu'aux combles où se trouvaient deux chambres frigorifiques, fermées par des poignées de métal. On pouvait y étudier en solitude sans être dérangé. J'en ai usé et Maryvonne Shiïtz aussi, et d'autres dont l'évocation des visages appelle des noms : Daniel Prévost et sa guitare, mon grand frère du dimanche, amoureux de Ferré. Marlène Jobert, son humour gouailleur, et ses escapades secrètes dans les maisons de production. Annie Sinigalia , Michèle Thévenin, Patrick Préjean, Georges Claisse, qui faisait vibrer le cœur des filles. Bruno Sermone, étrange et beau comme un Dieu de l'Olympe, Pierre démenti, Bernard Murât, Gilbert Beugniot . Claudie Gastine, mon amie d'enfance, aux décors et costumes... ma mémoire n'est pas exhaustive.

Anne BELLEC

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12 juin 2014 4 12 /06 /juin /2014 13:33

Originaire de Lyon, après 2 ans au Conservatoire National d’ Art Dramatique dans la classe de Janine Berdin et un an au cours Girard à Paris, je suis reçu après les 2 tours d’audition au Centre d’Art Dramatique. L’école située dans un hôtel particulier 21 rue Blanche aménagé en classes de comédie et en ateliers pour les décorateurs et les costumières est alors dirigé par Jean Meyer sociétaire honoraire et ancien administrateur de la Comédie Française. Les professeurs de comédie sont : HENRI ROLLAN, JACQUES HENRI DUVAL, TEDDY BILIS. La classe de diction est dirigée par ROBERT MANUEL sociétaire de la Comédie Française qui n’admet aucun retard et ferme la porte à clé dès le début du cours. Il y avait là également un surveillant général, une répétitrice, une assistante sociale et la gardienne du temple, charmante et redoutable dont la mission était de nous empêcher de sortir pendant les cours. Rien ne lui échappait et Jean Luc Moreau qui à plusieurs reprises fut surpris en passant par un soupirail sera renvoyé. Mes camarades de stage : MARIE KAIME, CHANTAL NOBEL, EVELYNE BUYLE, JEAN CLAUDE SACHOT, JACQUES WEBER, FRANCIS HUSTER…..Avec mon professeur TEDDY BILLIS j’ai appris à découvrir, à approfondir le caractère du personnage à interpréter, le respect du texte et du partenaire. Avec ROBERT MANUEL, que je retrouverai plus tard, la discipline, la rigueur, la passion, l’amour du métier. Avec JEAN MEYER J’ai gouté avec volupté à l’Histoire du Théâtre qu’il aimait tant conter avec fougue.

J’ai passé 2 ans au CAD (1965 1966) en tant que demi-pensionnaire, venant de province j’avais obtenu une bourse. Il y avait un réfectoire et nous déjeunions à 12h30 et le soir si nous le souhaitions vers 18h. Pour un jeune comédien ne se soucier que d’apprendre son métier était un immense privilège d’autant plus que nous avions la possibilité de jouer au théâtre ou à la télévision car les divers examens de passage étaient suivis par des réalisateurs et metteurs en scène. Nous assurions également le Festival d’ Egletons dans la salle de spectacle de l’école d’Agriculture avec 2 ou 3 pièces et un récital poétique.

En 2011, tout en jouant de temps en temps( LE THEATRE EST UN VIRUS TENACE) journaliste et responsable en Suisse Romande de la rubrique « culture »à la Radio et dans divers magazines, je conserve de cette période un excellent souvenir car j’y ai appris une certaine philosophie de la vie et puis nous étions une bande de jeunes chiens fous insouciant nous aimions ce métier sans limite et prêt à le défendre jusqu’au bout ce que je continue de faire dans mon domaine : le journalisme.

Serge Moisson.

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12 juin 2014 4 12 /06 /juin /2014 13:31

C’était hier…… Je me vois encore dans la salle du bas passer mon monologue de Camille d’Horace en juin 1961. Je n’avais jusque là pris que des cours de diction avec Reine Lorin et je faisais partie d’un club de poètes. Je me souviens surtout de mes deux maitres en art dramatique : Henri Rollan et Pierre Valde. Ils m’ont tous deux appris l’essentiel : Henri Rollan le respect du spectateur «articules, merde» je le revois articuler, ouvrant très peu la bouche, avec ses mains si vives et son auriculaire pointé comme lorsqu’il jouait le Cardinal D’Espagne ou le maitre de Philosophie au Français. Et Pierre Valde qui nous demandait de nous poser ces 3 questions avant de travailler un personnage et d’entrer en scène « d’où tu viens, où tu es et où tu vas ? » en fait c’était donner un sens à la vie du personnage. Ce qui était formidable au Centre c’était l’ambiance, la joie de tous les élèves, une effervescence dans les salles où il n’y avait pas de professeur et où l’on travaillait soit les scènes soit des pièces et….. Une telle envie de jouer.

C’est ce qui s’est passé pour moi dès le premier trimestre. A peine arrivée je me voyais enlevée par les élèves du conservatoire (Alain Pralon, Victor Beniard, Jean-Michel Devos : le père d’Emmanuelle) qui faisaient leur service militaire dans l’armée de l’air : ils avaient besoin de 2 filles pour monter Henry IV de Pirandello : le conservatoire à l’époque exigeait l’assiduité de ses élèves. Alors quelle chance pour nous : ce devait être Josée Destoop, ce fut Elia Loyer qui nous accompagna : elle resta mon amie et se maria très vite avec Maurice Clavel. C’est la plus fabuleuse tournée que j’ai faite : le commandant de bord venait nous chercher chez nous, nous étions des stars : nous sommes allés jusqu’à Dakar en DC10 et avons passé Noel sous la tente dans le désert ! Je pense aussi à mes parents qui m’avaient laissé partir ainsi, comme ils étaient en avance sur leur temps !

Puis aussitôt, je suis repartie avec une jeune compagnie je jouais Célia des « Caprices de Marianne ». Je me suis rendu compte à ce moment là que je n’avais pas la même image pour les uns et les autres : je pouvais passer de soubrette à grand premier rôle ! Dur, dur lorsque l’on est jeune….. Que pouvais-je jouer ? C’est bien ce que m’avait dit René Simon que j’étais allée consulter après mon échec au conservatoire : «de face, tu es moderne et de profil tu es classique ». En fin d’année nous avons fait le festival d’Egletons où je jouais l’Apollon de Bellac sous la direction de René Dupuy. Trois pièces en un an !

La deuxième année fut plus calme, j’avais décidé d’apprendre avec mon maitre Henri Rollan, de rester sur Paris car le soir je faisais une panne dans « Des clowns par milliers » au théâtre du Gymnase chez Marie Bell. J’ai eu la chance de côtoyer (si peu car trop timide) Simone Signoret qui venait chercher son mari, René Valmy avec qui j’ai eu le plus de contacts et Raymond Rouleau…

Au centre, nous avons joué « la fausse suivante » sous la direction de Pierre Valde. Elia interprétait le chevalier et moi la marquise. Nous répétions aussi les Choéphores avec Dominique Leverd : un travail d’élèves qui aurait pu aboutir. Par contre « la Fuite » de Tristan Tzara mis en scène par Claude Quémy au théâtre Grammont fut un grand succès.

Et puis il y eut le concours, je présentais Elmire, j’étais en pleurs dans le jardin parce que je n’étais que septième. Jean Poiret me cherchait pour me dire que j’allais faire une grande carrière…..OUH…ouh est-elle cette belle carrière ?

Enfin, nous étions toute une bande du centre à répéter le bossu pour le festival de Sarlat au conservatoire Maubel. Marc de Georgi jouait Peyrolles : il devint mon mari et père de ma plus belle réussite : mon fils.

En l’espace de deux ans, la rue Blanche m’avait mis sur les rails de ce métier dont j’ai toujours vécu grâce à mes deux maitres : Henri Rollan et Pierre Valde et à mes parents qui avaient su choisir la bonne école ! C’était le temps du bonheur.

Rosine Proust le 20/10/2010

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12 juin 2014 4 12 /06 /juin /2014 13:29

...Je suis entré à l'ENSATT, que l'on appelait moins pompeusement: la rue Blanche, ou plus officiellement le Centre d'Art Dramatique, en septembre 1964. J'étais déjà "entré" au théâtre en 1960. En trichant sur mon âge, je fus d'abord élève de José Valverde, puis, rapidement et simultanément de Pierre Debauche ... tout en continuant mes études au lycée ! Ceci pour une simple raison: mettre un pied dans le métier. ( Je n'avais jamais eu l'intention d'être comédien ).Et, tout en suivant les cours et en jouant des petits rôles, je travaillais sur les décors et les costumes des spectacles, pour le plaisir. Mon seul but étant de devenir décorateur de théâtre !

Renseignements pris sur une éventuelle école, on m'indiqua "La rue Blanche". Mais on me conseilla de m'y inscrire dès l'âge minimum requit et les diplômes nécessaires obtenus. Ce concours était réputé impossible à réussir la première année: sur sept cents dossiers de candidatures, dix élèves par classe étaient admis !!! Sauf que... je fus reçu dès ma première tentative, en classe de costumes ! Après une année chez Mademoiselle Boulay, je demandais à entrer dans la classe de décors. Ce qui me fut refusé, après hésitations, par la direction. C'était sans compter sur maître Gaulme, qui m'autorisa à me glisser dans l'atelier des décorateurs pour les cours importants ! Pendant les classes, il arrivait fréquemment que le surveillant général vienne annoncer qu'un théâtre, une compagnie ou un atelier demandait un ou plusieurs élèves pour aider à la finition d'un décor ou d'une série de costumes. Il s'agissait, bien sûr, de travaux à effectuer en dehors des cours, le soir, le week-end et, souvent, la nuit. Ces "missions" avaient un triple avantage: nous permettre de gagner un peu d'argent, nous faire découvrir le métier dans ses réalités et nous mettre un pied dans ce monde professionnel que nous espérions. Et si nous savions nous intégrer dans ces équipes nous nous faisions de bonnes relations pour l'avenir. J'ai toujours été partant pour ce genre de mission et, malgré les heures de travail que nous ne comptions plus, je ne l'ai jamais regretté. Sur le terrain, en plus des cours, nous nous frottions aux réalités du métier et nous saisissions mieux ce qu'on appelait alors " avoir le sens du théâtre ".

C'est grâce à ces missions que j'eus le bonheur, et la chance, de rencontrer et de travailler avec plusieurs décorateurs, metteurs en scène, musiciens, chorégraphes dont Janine Charrat qui, après que j'eus passé trois jours et deux nuits pour finir un décor et restaurer quelques costumes, me demanda d'être le décorateur de sa compagnie, le Ballet de France, avec lequel j'ai travaillé pendant sept ans.

Un autre cadeau de l'École était la distribution de cartons d'invitations pour assister aux représentations des nouveaux spectacles des théâtres publics et privés. Et nous ne nous en privions pas ! Générales à la Comédie Française, à l'Odéon, à Antoine, à L'œuvre, ... au TNP, un des rares théâtres publics de cette époque; mais ça allait changer...

Nous étions des privilégiés et, le plus extraordinaire, c'est que nous le savions ! Avec un peu de bonne volonté et beaucoup d'abnégation, nous avions un enseignement complet qui nous préparait à entrer, courageusement, dans ce métier qu'on disait aléatoire. Apprentissage théorique et pratique dans les classes, professionnel par les missions extérieures, artistique en nous faisant spectateurs des nouvelles mises en scène.

J'ignore si Pierre Sabbagh avait prévu ces élargissements de l'enseignement quand il a créé le Centre d'Art Dramatique, mais nous lui devons reconnaissance et gratitude pour avoir créé cette école unique en son temps. Qui, de nous, n'a pas vu s'ouvrir les portes au seul titre d'ancien élève de la rue Blanche ?

Ce qui nous confortait dans l'idée que nous avions bien choisi notre métier et l'école pour y parvenir, c’était aussi l'effervescence et l'émulation qui régnaient dans la maison: les interminables discutions dans le jardin, après les cours, entre ceux qui affirmaient que le prince Hamlet était fou, et ceux qui avançaient qu'il simulait la folie ! (sous l'œil amusé de Jean Meyer, Robert Manuel ou Teddy Billis ... ); il fallait créer un nouveau théâtre, (mai 68 n'était pas loin...), après que l'on eut sacrifié la Comédie Française sur le bûcher des vanités; puis construire des salles en banlieue pour y exporter le théâtre ... ce à quoi nous avons tous participé, un peu plus tard. Sans compter ceux qui se lançaient dans la création d'une compagnie et qui distribuaient rôles et emplois dans les couloirs; et ceux qui exerçaient leurs talents naissant dans le cadre des fêtes de fin d'année, en interprétant des sketches de leur cru; je pense à Rufus ... entre autres.

Je n'ai jamais quitté ce métier. Je l'exerce toujours, plus ou moins, ayant élargi mon champ d'action à l'écriture, la mise en scène, et la direction artistique. À la Bibliothèque historique de la Ville de Paris, j'ai été scénographe et commissaire d'expositions sur le théâtre, dont une que j'ai dédié aux grands décorateurs de théâtre des années 1950-1980, Les Bâtisseurs de Rêves, que j'accompagnais du livre éponyme. *

Des bâtisseurs de rêves... c'est ce que l'ENSATT nous a appris à devenir et que, j'espère, nous restons, dans chaque métier du spectacle vivant, pour les spectateurs.

Roger Jouan

* Les Bâtisseurs de Rêves, Éditions Paris bibliothèques, Paris, mars 2003.

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12 juin 2014 4 12 /06 /juin /2014 13:24

J’ai préparé le concours chez Périmony sur les conseils de mon oncle Philippe Lemaire, en 1959 et intégré la même année. D’abord dans la classe de R.Manuel avec qui ce fut vite conflictuel, j’atterrissais avec joie chez Mme Bovy au caractère bien trempé mais si compétente; déjà âgée elle était souvent remplacée par Mme A. de Chauveron

Dans cette bonbonnière qui éclatait de jeunes friands de tout, nous répétions dans les couloirs avec mes camarades: C.Brosset, G.Claisse, M.Schiltz, JP.Leroux, C.Lapaco (toujours mon amie et qui mène une carrière sans faille en Argentine); nous montions des pièces dans le petit théâtre, je me souviens d’un Horace mis en scène de Mr Reynier que j’assistais, de L.Pascal qui donnait des cours de Régie, des couturières qui arpentaient les couloirs les bras chargés de costumes....tous ces corps de métiers que l’on découvrait en autarcie joyeuse à l’aube de nos 20 ans.

Pas un jour je ne suis allé au Centre sans entrain le sourire aux lèvres, sachant que H.Rollan reprendrait notre diction, que Maître Gardère nous apprendrait la ‘garde et le moucheté’.

Le soir je courrais à la CF où avec d’autres nous ‘jouions’ au milieu des grands dans la Reine Morte, le Mariage de Figaro, la Fourmi dans le Corps qui soulevait chaque soir une foule hurlant au scandale....Souvenirs impérissables dont je suis aujourd’hui redevable et qui ont marqué mon parcours.

Aujourd’hui encore lorsque je suis en répétitions ou sur scène c’est à ce lieu que je pense, ce lieu qui m’a donné le goût de ce métier et de l’art indispensable à ma vie.

Une pépinière d’artistes est passée par ce lieu unique ou le brassage était son originalité.

Patrik Lemaire Somery-gade.

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12 juin 2014 4 12 /06 /juin /2014 13:21

Ce qui était exceptionnel au centre, c'était la théorie et la mise en pratique instantanée. On peut dire que le centre ça été ma première troupe car, contrairement au conservatoire, on se retrouvait tout de suite en situation d'artistes élèves interprètes, c'était la boîte magique : en effet il n'y avait pas uniquement l'apprentissage de la comédie, il y avait aussi les régisseurs, les décorateurs scénographes, les machinistes, les électriciens, les constructeurs, les costumiers et les habilleuses... Il y avait tout, toute la famille, c'était déjà tout une troupe. Ainsi on entrait donc tout de suite de plain-pied dans ce qui allait être notre vie professionnelle plus tard. Cela, c'était exceptionnel. Et puis il y avait cette bonne humeur, cette fraternité, cette insouciance… chacun avait une certaine magie dans les yeux, et de la confrontation des magies de toutes ces catégories naissaient des étoiles. Je ne dirais pas cela, par exemple, du conservatoire ou il y a eu des moments formidables aussi, mais rue Blanche c'était vraiment la révélation : se retrouver dans une grande école d'Etat, directement confrontés à ce dont nous rêvions depuis déjà pas mal de temps. Cette disponibilité de la salle de théâtre où l'on pouvait aller se faire des dents, avec des spectacles que l'on jouaient dans le centre de la rue Blanche, mais que l'on allait aussi pouvoir jouer en festival à Egletons, déjà on était en tournée, c'était formidable !

Et puis, j'ai eu ce professeur fabuleux qu’était Henri Rollan, c'était un grand, un très grand maître. Rollan c’est la grande maîtrise. C'est quelqu'un qui n'a jamais demandé qu'on l’appelle maître mais il fallait que nous trouvions entre nous des termes appropriés à la grandeur de son enseignement et de ce qu'il dégageait humainement on avait tout simplement envie de l'appeler maître et nous le faisions sans que personne nous l'ait demandé (contrairement à certaines personnes rencontrées plus tard au cours de ma carrière qui sollicitaient ce titre alors qu’ils ne le méritaient pas)

Au chapitre des anecdotes nous étions à l'âge du flirt. Il existait au deuxième étage d'anciennes chambres froides désaffectées, c’était un lieu interdit ou nous nous rendions en couple pour transgresser un tant soit peu les interdits. Je me souviens aussi des cours d'escrime de maître Gardère (s'appeler Gardère et être professeur d'escrime, ça ne s'invente pas) nous organisions des combats sur les marches qui menaient à la cour intérieure. C'était des moments de récréation très agréables.

Puisque nous en sommes aux anecdotes il faut que je parle de mes débuts de la tragédie. Aujourd'hui je joue aussi les rôles dramatiques mais à l'époque mes professeurs me voyaient plutôt dans des rôles comiques, parfois d'une manière un peu caricaturale (peut-être l’étais-je).

Mais j’ai joué la tragédie, une fois, une seule, c’était dans Horace (Claude Brosset jouait Horace et Georges Claisse Curiace). Un jour, le garde (Flavian, soldat de l’armée d’Albes) tombe malade et ne vient pas. Il faut absolument sauver la situation. On me dit : « tu rentres dans le costume, tu vas y aller » et je me dis « formidable, moi qui adore le péplum, enfin une occasion de me mettre en tunique » je me maquille tout le corps, j'apprends les dix ou douze vers du rôle, me voilà me prenant tout simplement pour Charlton Heston dans Ben-Hur. Au moment de mon entrée je suis tout chamboulé, et la je cite Claude Brosset qui jette un œil en coulisses et aperçoit « un garde avec sa lance qui tremble comme une feuilles de la tête aux pieds ». Dans la salle le public était composé de jeunes filles de douze à quatorze ans, à chaque entrée d'un mec en tunique elles hurlaient chaque fois un peu plus fort. Il faut ajouter que tous les copains, qui avaient l'habitude de me voir dans les premiers ou seconds valets de Molière, étaient venus voir ce que ça pouvait donner Prejean dans un rôle de tragédie. J'étais tellement paniqué que je me prends les pieds dans le tapis, ma lance se plante dans le praticable et le troue. Claude Brosset se tourne, dos au public, des larmes de rire sur le visage, et son dos pris de soubresauts. Dans la salle c'est la rigolade générale. Nous essayons de continuer Curiace lance : « Et bien qui sont les trois ? » au lieu de répondre : « vos deux frères et vous » j‘avale les vers et bredouille « Heu… j’vous apporte une nouvelle !.. ».Là, plus personne ne pouvait bouger, nous étions tous paralysés par le rire. Je venais de faire une entrée « triomphale » dans la tragédie… à plat ventre.

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